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Donner son quitus au syndic

Donner son quitus au syndic n’exonère aucunement le syndic d’une quelconque responsabilité envers le syndicat des copropriétaire  si des erreurs de gestion ont été commises. Le quitus est un usage de la profession. 

 

 

 

 

 

Quelle est l’origine du mot « quitus » ?

 

A l’ordre du jour de toutes les assemblées (ou presque), on trouve la résolution qui concerne le « vote du quitus » au syndic. Cette appellation nous vient du 16ème siècle, du mot guittus, qui signifiait à l’époque « rendre quitte des comptes et chartes », ce qu’on peut aujourd’hui traduire par « donner son approbation à ». On retrouve ce terme employé dans les assemblées d’actionnaires : les actionnaires qui donnent leur quitus approuvent la gestion des mandataires sociaux. Toutefois, en matière de copropriété, le quitus n’est prévu par aucun texte de loi, tout comme pour les sociétés ou les associations d’ailleurs. Le quitus demeure une pratique établie et traitée par la jurisprudence.

 

Quelles sont les conséquences si le quitus est donné au syndic ?

 

On lit bien souvent que si le quitus est donné au syndic, et que des erreurs ou des fautes de gestion sont ensuite découvertes par les copropriétaires, le syndic demeure inattaquable et protégé. On lit même parfois que le quitus protège le syndic de ses erreurs pour toute la durée de son contrat. C’est heureusement faux.

 

Le quitus n’est libératoire de responsabilité que pour les actes de gestion dont l’assemblée générale a eu connaissance et qu’elle a été à même de constater[i]. Autrement dit, si l’assemblée approuve des comptes ou des actes de gestion dont elle a parfaitement connaissance, et qu’elle donne son quitus, alors oui, elle ne pourra pas ensuite rechercher la responsabilité du syndic devant les tribunaux. Ce qui semble assez logique. Si au contraire, l’assemblée (ou un copropriétaire) donne son quitus sur des éléments de gestion dont il ne pouvait avoir connaissance, et qu’une erreur est ensuite révélée, l’action du syndicat ou du copropriétaire à l’encontre du syndic sera bien entendu recevable. Il ne peut en être autrement, le syndic étant un professionnel, et les copropriétaires ne l’étant pas.

 

Le tribunal apprécie toujours souverainement la valeur probante des éléments qui sont soumis à son examen. Il a été jugé ainsi qu’un copropriétaire qui n’avait jamais fait attention aux charges que son syndic lui appelait, tandis qu’il lui avait donné son quitus, avant d’introduire ensuite une action en contestation des charges, n’était pas recevable à agir[ii]. Mais, les conditions étant cumulatives, on peut supposer que la Cour n’aurait pas débouté le copropriétaire si celui-ci avait contesté les charges appelées, et ensuite donné son quitus. De la même façon,  un syndic qui est reconduit chaque année et obtient son quitus, mais qui ne présente pas le montant de ses honoraires au vote de l’assemblée ne peut prétendre par ces seuls votes une justification de sa rémunération[iii]

 

Le quitus, est une notion civiliste – celle de l’article 1993 du C. civil – : un mandataire doit rendre compte de la gestion de son mandat et peut recevoir de son mandant ratification de ce dernier. Le quitus, c’est l’approbation du mandant, mais donner son quitus ne signifie pas que toute action ultérieure est éteinte : le copropriétaire ou syndicat lésé est tout à fait fondé à introduire une action pour dol, tromperie, et dissimulation, qui ne sont pas si difficiles pour un non sachant. Bien entendu, si le copropriétaire lésé est lui-même un professionnel (syndic ou syndic bénévole, comptable copropriété ect..), son action sera alors plus difficile à justifier.

 

Déjà en 1986 la Cour d’appel de Versailles[iv] décidait que le quitus « vaut approbation des comptes du syndic et des actes de gestion qui ont été portés à la connaissance de l’assemblée générale ». Mais elle ajoute que « le quitus ne saurait couvrir l’inaction du syndic dans le cas où, lorsqu’ils ont émis leur vote, les copropriétaires n’avaient pas eu connaissance de cette inaction, et n’étaient donc pas à même d’en apprécier les conséquences ».

 

En résumé donc, la jurisprudence est constante depuis plus de 20 ans et il n’y a aucun risque à donner votre quitus à votre syndic. Et si celui-ci a commis des erreurs de gestion pouvant être condamnées par un tribunal, vous pourrez toujours agir contre lui en responsabilité. Mais si vous êtes un professionnel aguerri, ou bien que vous aviez connaissance des erreurs de gestion, alors non, ne donnez pas votre quitus, cela vous préservera d’être débouté de vos actions par la suite.

 

 

Quelles conséquences si le quitus est refusé au syndic ?

 

Les conséquences ne sont pas bien importantes, là non plus. Toutefois, ne pas donner son quitus peut être perçu par le syndic comme un acte de méfiance de la part de l’assemblée. Il y a quelques décennies, avant que la crise n’arrive, certains syndics qui se voyaient refuser le quitus n’hésitaient pas à  rendre leur tablier  et quitter la séance, laissant probablement le syndicat des copropriétaires en grand désarroi.Ceci n’arrive plus – à ma connaissance – aujourd’hui. Ne pas recevoir quitus, ca ne fait jamais plaisir, mais cela n’a aucune conséquence pour le syndic, celui-ci doit donc poursuivre la gestion de l’ immeuble normalement.

 

En conséquence, faut-il donner ou non son quitus ?

 

Et bien peu importe. C’est surtout l’aspect psychologique qui compte ici. Ne pas donner quitus à un nouveau syndic qui vient d’être choisi par le syndicat des copropriétaires, c’est un peu curieux, c’est comme lui dire « nous vous avons choisi mais nous ne vous faisons pas vraiment confiance ». Difficile de commencer une relation pour du long terme dans ces conditions.  Le plus sage, à mon sens, et de donner votre quitus lors du renouvellement de votre syndic, et de le refuser en cas de changement. Si votre syndic est un professionnel avisé, qu’une relation de confiance s’est établie entre lui et les copropriétaires ou le conseil syndical, refuser de lui donner quitus n’a pas grand sens, d’autant qu’en cas d’erreur involontaire de gestion il saura la rectifier, et que sinon, en cas de réel contentieux,  les actions civiles ou commerciales vous resteront ouvertes.

Si au contraire vos relations sont tendues avec votre syndic et que le Conseil suspecte des erreurs réelles, il convient de le refuser, voire l’assigner en réparation, et de le quitter pour un autre syndic .

 

 

 


[i] Cass, chambre civile 3ème, 23.06.1999, pourvoi n° 97-17085

[ii] Cass, Chambre civile 3 ème, 11.02.2009, pourvoi n° 07-18910.

[iii] Cass, Chambre civile 3ème, 27.03.2008, pourvoi n°07-10191.

[iv] CA Versailles 04/06/1986, Rev. Loy. 1986-323.

 

 


 

 

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